Tuesday, November 22, 2005

Optic Nerve

on8

Même si les citations d’ordre musical sont quasiment absentes de son œuvre ( je ne vois guère que la pochette de Trust sur un de ses premiers croquis et le tee-shirt Husker Dü que porte Rob Hullen dans Two in the morning ) , je ne connais pas d’œuvre picturale plus proche de l’Indie pop que celle d’Adrian Tomine. La série des Optic Nerve, c’est pour moi l’équivalent graphique des disques des Softies, des Trembling Blue stars ou de Yo la Tengo . Publié par Drawn & Quatterly depuis 1994, les petits fascicules appelés Optic Nerve brossent une belle galerie de geeks, de nerds et même de creeps, incapables de se projeter dans une vie d’adulte ni d’avoir des relations sociales satisfaisantes ( excepté Ben dans O.N 9 ). Ses personnages principaux (et les confessions de Tomine dans la préface de 32 stories laissent à penser qu’il y a beaucoup de lui en eux) prolongent indéfiniment leur adolescence ou s’ils sont encore se forgent une carapace pour s’empêcher de muer ( Scotty dans Bomb scare). Paradoxalement, ces grands inadaptés au monde moderne travaillent souvent sur un clavier d’ordinateur qu’ils soient gérants de cinéma, écrivains, designers ou opératrices téléphoniques. Le moniteur fait écran à la réalité mais pas à leur ennui et à leurs souffrances. Leurs histoires de cœur sont au mieux compliquées ( Ben et sa petite amie, Martin et Erin), au pire inexistantes si ce n’est à l’état de purs fantasmes ( Neil et Vanessa dans Summer Blonde )

Tomine 2

Ces mini-récits de 32 pages s’attardent sur des instants peu spectaculaires mais faussement anodins comme une déambulation dans un supermarché ou un rhabillage dans un vestiaire . Tomine n’est rarement meilleur que lorsque ses personnages sont confrontés à des moments pénibles, voire scabreux. Je pense à Cammie s’oubliant sur le canapé de Bryan ou Neil tâchant de se justifier devant Vanessa. Les incertitudes, les hésitations, les frustrations sont au cœur de ces vignettes. Parfois, la cruauté affleure ( les appels téléphoniques d’ Hillary, le projectile que reçoit Donovan sur le campus ) mais Tomine n’est pas dans le jugement. Il laisse à chacun de ses personnages sa part d’humanité. Il ne les enferme pas dans la caricature. Corollaire de cette irrésolution généralisée, ces histoires sont souvent laissées en suspens ( au grand dam de beaucoup de ses lecteurs si l’on en croit les lettres publiées au verso des couvertures ) et on le sent peu à l’aise avec la notion de point final ( comme dit le narrateur dans Alter ego, « He needed to be sure he had the ending right » )

Graphiquement, son œuvre ( dont je réalise que je possède la quasi -intégralité ) recèle de petits joyaux. Certaines cases sont si belles et bien composées qu’on jurerait lire un storyboard d’un film de Todd Solondz ( cinéaste avec lequel il partage une grande parenté d’inspiration ). Quelques poteaux télégraphiques, du mobilier urbain, des panneaux indicateurs, il ne lui en faut pas plus pour installer un univers instantanément identifiable.Poteau

Clowes est plus délirant, plus twisted, plus punk rock aussi( Ghost World reste pour moi un étalon du comic book indépendant américain ) mais Tomine me touche plus profondément.

Pour le moment sont disponibles en édition française :

Les yeux à vif ( les premiers O.N privilégiant les histoires courtes mais comprenant l’inégalé Dylan & Donovan ( ah tiens, voilà, une autre référence musicale ) chez Delcourt
Blonde platine ( recueillant et traduisant les numéros 5, 6, 7 & 8 d’Optic Nerve ) aux Editions du Seuil.
Toutefois, dans la mesure du possible, tâchez de vous débrouiller pour vous procurer les fascicules originaux en anglais ( d’une lecture très simple, certaines de mes élèves de troisième y parvenaient ). Vous ne le regretterez pas.

Tomine 1


Wednesday, November 09, 2005

Teachers like us

Teachers vol.2Le problème avec Teachers, la série dont j'ai le plus envie de vous entretenir, c’est que beaucoup d’entre vous ont peu de chance de la voir un jour. Je vois mal en effet une chaîne hertzienne miser sur le quotidien d’une comprehensive school à Summerdown dans la banlieue de Bristol. Sur le câble peut-être dans un lustre ou deux. Pour le moment, la seule solution est de commander les saisons sur des sites anglais.
La chance a voulu que lors d’un de mes trop rares séjours dans la patrie de Churchill, je tombe dans un moment d’oisiveté sur cette série pas banale. Au lieu comme c’est l’usage dans la plupart de séries de s’attacher à des adolescents chahuteurs, dragueurs ou mal dans leur peau, Teachers préfère se concentrer sur leurs enseignants montrés sous un jour très inhabituel. Hâbleurs, tire-au-flanc, puérils, irreponsables, avides de tits plus que de Keats , Kurt, Simon et Brian dont l’univers intellectuel dépasse rarement les limites du pub donnent une image peu reluisante des fonctionnaires britanniques . Les femmes, Suzanne et Jenny relèvent le niveau comme pour mieux souligner la crasse incompétence de leurs collègues masculins.
Si vous n’avez que l’instit’ ou Madame le proviseur en tête comme héros récurrents à dominante pédago’ , Teachers risque de vous décrasser les neurones. A Summerdown, les profs font rarement des heures supplémentaires ( si ce n’est pour balancer un mouton hagard dans le bureau du headmaster ) et les copies sont corrigées au rythme des fléchettes du pub. C’est drôle parce que l’institution est bousculée mais que les personnages existent vraiment. Andrew Lincoln (Simon) passe parfois les bornes du cabotinage le plus éhonté mais dans l’ensemble, les acteurs font du bon boulot (mention spéciale à ma petite Zoé Telford qui hélas disparaît à la fin de la première saison ( son minois vous dit peut-être quelque chose si vous avez vu Matchpoint, elle joue la secrétaire mutine de Chris )).zoe_telford Quand j’aurai dit en plus que la bande-son regorge de pépites britpop (c’est carrément The boy with the arab strap qui sert de générique), vous comprendrez mieux pourquoi j’ai fait de Teachers le nouvel étendard de mon anglomanie*.

* : Fred V., un de mes collègues d’E.P.S affirmait même en interclasse que si des anglais me chiaient sur la tête, je serai capable d’aller jusqu’à les remercier. C’est pas faux.

Tuesday, November 01, 2005

Dial W for Woody

Le vieux maître en a encore sous la pédale et Match point met la barre très haut, loin des resucées faiblardes quoiqu' aimables type Manhattan murder mystery. J'aurai aimé vous dire tout le bien que j'en pense et même tenter un rapprochement avec un des mes films préférés, A place in the sun de George Stevens mais comme je répugne à jouer les "spoilers", je patienterai jusqu'à ce que vous l'ayez tous vu.

Match point