...while the Haze woman and I went down the steps into the breathless garden, my knees were like reflections of knees in rippling water,...
« Talent, intelligence, versatility, independance and enterprise ». Qu’ajouter à cette liste de qualificatifs forgée par David Thomson dans sa passionnante somme, The new biographical dictionary of film ( peut-être un jour sera-t-il traduit en français) ? James Mason qui selon ses propres dires ne fut jamais une star ( pas assez de premiers rôles sans doute et trop de finesse ) mérite largement tous ces qualificatifs auxquels on pourrait ajouter sans risque d’ être contredit le charme et l’esprit. Il est évidemment fascinant dans les personnages de villains ( combien l’étoile de Stewart Granger pâlit lorsqu’elle est confrontée au soleil noir de Rupert d’Hentzau dans The prisoner of Zenda) et l’on peut regretter qu’Hitchcok n’ait tourné qu’une seule fois avec lui ( mais quelle fois, c’est vrai ! ) dans North by northwest . Dans mes rêves les plus fous, je l’imagine remplacer au pied levé Claude Rains dans Notorious (quel affrontement aurions-nous eu avec Cary Grant mais Mason n’avait pas encore quitté l’Angleterre pour Hollywood).
Et pourtant, cet acteur né pour jouer les félons ne m’impressionne jamais autant que dans Lolita. Quand je pense que le rôle de Humbert Humbert faillit lui échapper ! D’abord parce que Mason n’était qu’un second choix pour Kubrick ( il avait d’abord songé à Erroll Flynn mais celui-ci mourut en 1959 alors que le film n’était qu’à l’état d’ébauche ) mais aussi parce qu'initialement le futur Capitaine Nemo avait refusé la proposition du maître avant de finalement accepter ( a l’époque, il songeait sérieusement à la comédie musicale après qu’un agent l’eut repéré chantant I’ve got a lovely bunch of coconuts dans un cabaret ). Mason est tellement Humbert Humbert que Nabokov dont le script fut très largement transformé s’avoua malgré tout satisfait du résultat final. A la fois équivoque et désemparé, tourmenté et plein de mauvais esprit ( il faut le voir dans sa baignoire brûlante recevoir les doléances des époux Farlow alors que le corps de Charlotte est encore tiède ), il a par sa seule prestation, je crois, découragé pour un long moment la mise en oeuvre d’un remake ( celui-ci finira par se faire vingt cinq ans plus tard sous la direction d’Adrian Lynne ( en attente d’un visionnement, je m’abstiendrai de tout commentaire )). Mais en dehors de la direction de Kubrick ( les plans qui introduisent Lolita sont une leçon de cinéma ) et de la composition de James Mason, il faut absolument rendre à Sue Lyon la part importante qu’elle tient dans la réussite du film. Pendant longtemps ( c’est à dire de ma première vision du film en 1985 jusqu’à aujourd’hui ), je me suis contenté de répéter sottement ce que j’avais entendu ailleurs ( c’est à dire qu’elle était trop vieille pour le rôle ) sans considérer la qualité de son jeu. C’est James Mason dans une autobiographie pleine de vacheries ( Before I forget, 1981 ) qui règle le mieux cette question de l’âge. Un critique faisant un jour ce reproche au film , voilà ce qu’il répondit : « You see, Lolita did not remain the same age throughout Nabokov’s story. She was indeed twelve years old when Humbert first met her, but when he found her again, she was married and pregnant and surely not less than eighteen. Now it is much easier for a petite eighteen-year-old to pretend to be twelve than for a twelve-year old to make like an experienced eighteen-year-old" . Une des raisons qui fit retenir Sue Lyon lors du casting ( plus de 800 adolescentes s’y étaient présentés ) fut sa poitrine relativement considérable pour son age ( elle n’avait que 13 ans et demie alors ). En effet, la censure de l’époque n’aurait pas accepté une love story avec une nymphette pré-pubère . Au moment du tournage, elle a beau afficher quatorze ans et demie, je la trouve parfaitement en adéquation avec toutes les facettes de Lolita ( sauf peut-être dans la scène finale où les lunettes ne suffisent pas intégralement à la vieillir ). Malgré un brushing un peu daté fifties dans ses premières scènes, on a aucun mal à comprendre pourquoi le quinquagénaire succombe à ses charmes ( surtout lorsqu’elle apparaît vêtue d’un simple tutu lors de la représentation théâtrale ). Elle incarne parfaitement ce mélange de sensualité et d’innocence qui fait qu’elle est Lolita avec en plus un soupçon de vulgarité dans l’attitude qui justifie les accès de démence du professeur Humbert .*
Seule restriction ( mineure, j’en conviens ) à mon enthousiasme : Peter Sellers. Kubrick, fasciné par cet histrion, a gonflé démesurément son rôle ( c’est James Mason qui confirme : "[ Kubrick] was so besotted with the genius of Peter Sellers that he seemed never to have enough of him )". Le réalisateur a laissé le champs libre à sa manie du travestissement et à son goût immodéré pour les accents tudesques ( son incarnation du psychologue scolaire, le docteur Zempf, frise même l’autoparodie ) . Il me semble que l’élément perturbateur Clare Quilty aurait gagné en force s’il avait été moins présent à l’écran.
* : Sue Lyon comprenait parfaitement tout ce qui se passait dans le film et à 13 ans, elle avait d'ailleurs déjà lu le livre. Sue Lyon a eu de la chance de pouvoir le lire. On peut parier que si Lolita était présenté à un éditeur américain aujourd'hui, il aurait peu de chances d'atterrir sur la table de nuit d'une teenager californienne.
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